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Report de l'EUDR 2025 – ce que vous devez savoir sur les dernières mises à jour
Un report de l'entrée en vigueur du règlement EUDR 2025 a été proposé, créant une incertitude pour de nombreuses entreprises. Voici ce qu'il faut savoir.
Le règlement de l'Union européenne sur la déforestation (EUDR) constitue l'une des initiatives de développement durable les plus ambitieuses jamais entreprises par l'UE, visant à freiner la déforestation liée aux chaînes d'approvisionnement mondiales. Toutefois, à l'approche de son entrée en vigueur prévue en décembre 2025, la Commission européenne a proposé un report partiel et un ajustement de son déploiement.
Cette décision reflète les difficultés opérationnelles, techniques et administratives auxquelles sont confrontés les régulateurs et les entreprises pour mettre en œuvre un cadre aussi gourmand en données. Pour les opérateurs européens comme pour les exportateurs internationaux, ce report offre un répit précieux pour harmoniser leurs systèmes de diligence raisonnable, la gestion de leurs données et leurs processus de relation avec les fournisseurs.
L’orientation reste néanmoins inchangée : l’UE attend des entreprises qu’elles garantissent une traçabilité complète et un approvisionnement exempt de déforestation. Il est désormais essentiel pour les responsables des achats, de la conformité et du développement durable, tous secteurs confondus, de bien comprendre la portée et l’étendue de ce report, qui se prépare à la prochaine phase de mise en conformité dans le cadre du règlement EUDR.
Pourquoi un report a-t-il été proposé ?
Plusieurs facteurs expliquent le report proposé de l'application intégrale du règlement EUDR. Les principaux sont les suivants :
- Problèmes de préparation opérationnelle : La Commission européenne a souligné des contraintes de capacité dans son infrastructure informatique prévue, le « système d’information EUDR », destiné à recevoir et à traiter de grands volumes de déclarations de diligence raisonnable de la part des entreprises.
- Volume des déclarations de conformité : L’industrie et l’UE ont indiqué que le nombre de déclarations requises pourrait être bien supérieur aux estimations initiales, potentiellement de plusieurs centaines de millions à un milliard par an. Cela représente une contrainte importante pour les entreprises et les organismes de réglementation.
- Réactions des parties prenantes : Les producteurs et les négociants exportant des matières premières telles que l’huile de palme, le soja, le bœuf et le cacao ont exprimé des inquiétudes quant à leur niveau de préparation, aux coûts de mise en conformité et aux distorsions de concurrence. Par exemple, l’organisme malaisien chargé de l’huile de palme s’est félicité de l’octroi d’un délai supplémentaire pour se préparer.
- Préoccupations liées à la concurrence et au marché : certaines grandes entreprises agroalimentaires ont signalé que l’incertitude quant au calendrier de la réglementation freine les investissements et la planification de la chaîne d’approvisionnement.
- Demandes de flexibilité et de simplification réglementaires : certains États membres de l’UE et des acteurs industriels européens ont plaidé pour un allègement des contraintes pesant sur les petits opérateurs, les négociants en aval et les micro-fournisseurs. Les récentes propositions de la Commission en témoignent.
En résumé, la proposition de report ne concerne pas seulement un délai supplémentaire, mais aussi la refonte du « comment » de l’entrée dans l’EUDR, c’est-à-dire la charge administrative, les systèmes de données et les rôles/responsabilités des entreprises dans la chaîne d’approvisionnement.
Les défis de l'EUDR et de la gestion des données
Pour les entreprises opérant sur le marché de l'UE ou y exportant, le règlement EUDR présente plusieurs défis interdépendants axés sur les données, la visibilité de la chaîne d'approvisionnement et la gestion des risques, notamment :
Exigences de traçabilité et de géolocalisation
Les opérateurs devront fournir la géolocalisation (coordonnées ou polygones) des unités de production, cartographier les chaînes d'approvisionnement jusqu'à l'origine des produits et démontrer leur conformité à la législation locale et leur statut « exempt de déforestation » (c'est-à-dire aucune conversion de forêt après le 31 décembre 2020).
Déclarations de diligence raisonnable (DDR) et obligations de déclaration
L'un des éléments essentiels du règlement EUDR est l'obligation pour les opérateurs/négociants de soumettre une déclaration de données fournisseurs (DDS) à un système d'information centralisé et de documenter les évaluations des risques, les mesures d'atténuation et la vérification des pratiques des fournisseurs. Le volume et la complexité de ces obligations sont cités comme des obstacles majeurs.
Fiabilité du système de données et charge administrative
La nécessité d'une plateforme informatique robuste capable de gérer des volumes massifs de données, de recouper les données provenant de plusieurs pays, d'évaluer les risques liés aux régions d'origine et de permettre aux autorités compétentes de garantir la conformité est citée comme une contrainte majeure. La proposition de la Commission fait référence à la « réduction de la charge sur le système d'information ».
Responsabilité en aval vs en amont
Le règlement désigne les opérateurs en amont (ceux qui mettent le premier produit sur le marché de l'UE) comme principaux responsables du respect des obligations. Les négociants en aval, les détaillants et les transformateurs doivent toujours vérifier l'intégrité de la chaîne, mais leurs obligations directes sont moindres. Toutefois, cette distinction soulève des difficultés en matière de coordination de la chaîne d'approvisionnement, de contrats, d'audits et de partage des données.
PME, micro-opérateurs et classification des risques
Les petits producteurs et exploitants (micro-entreprises ou PME) manquent souvent de ressources, de systèmes de gestion des données et de capacités de cartographie des fournisseurs. La récente proposition de la Commission vise à alléger leurs obligations (notamment les déclarations ponctuelles), mais d'un point de vue commercial, elle soulève encore des questions quant à leur capacité de préparation et leur intégration aux grands réseaux.
Approvisionnement mondial et conformité des pays tiers
De nombreuses matières premières concernées sont produites hors de l'UE. Garantir la légalité locale (utilisation des terres, conversion des forêts, travail, accords d'exportation), collecter les données requises et gérer les relations avec les fournisseurs dans différentes juridictions représente un défi complexe et risqué.
Les entreprises doivent évaluer non seulement leurs opérations directes, mais aussi l'écosystème plus large de la chaîne d'approvisionnement en amont (et en partie en aval), cartographier les points de risque, investir dans les systèmes de données/informatiques et se coordonner avec les fournisseurs, souvent dans plusieurs régions géographiques.
État actuel de l'EUDR
Voici un résumé de la situation actuelle (en octobre 2025) avec les dates clés, les obligations et les changements proposés :
- Le règlement, officiellement le règlement (UE) 2023/1115, est entré en vigueur en juin 2023.
- La date limite initiale de dépôt des demandes a été repoussée du 30 décembre 2024 au 30 décembre 2025 pour les opérateurs de grande et moyenne taille.
- Le 21 octobre 2025, la Commission européenne a confirmé que les grandes et moyennes entreprises devront se conformer à la réglementation à compter du 30 décembre 2025 (date d'entrée en vigueur des obligations légales).
- Pour les micro et petites entreprises (« micro/petits opérateurs primaires »), la Commission a proposé de reporter l’intégralité de leurs obligations jusqu’au 30 décembre 2026 (au lieu de juin 2026) dans le cadre de sa proposition de modification.
La Commission a également proposé un délai de grâce de six mois pour les contrôles/l'application de la réglementation par les autorités compétentes à l'égard des grands opérateurs (c'est-à-dire que l'application de la réglementation commencera vers le 30 juin 2026 pour les grands opérateurs), tandis que les micro/petits opérateurs pourraient faire l'objet d'une application de la réglementation plus tard.
Les amendements proposés comprennent des mesures de simplification : exemption des opérateurs en aval de la soumission de DDS si l’amont l’a fait ; les micro/petits opérateurs dans les pays à faible risque pourraient n’avoir besoin que d’une déclaration simplifiée unique ; réduction de la charge pesant sur les petits et micro-opérateurs primaires.
Bien que la possibilité de reporter l’entrée en vigueur intégrale de la réglementation pour les grands exploitants à 2026 ait été évoquée, la Commission a rejeté l’idée d’un report général d’un an pour tous.
D’un point de vue juridique, tant que l’amendement n’est pas formellement adopté par le Parlement européen et le Conseil, les dates d’application juridiquement contraignantes restent celles initialement convenues.
Conséquences pour les entreprises : les sociétés ne peuvent pas compter sur un délai uniforme ; les grands opérateurs doivent considérer l’échéance du 30 décembre 2025 comme ferme, tout en envisageant une approche progressive, une mise en œuvre transitoire et des dispositions spécifiques pour les acteurs de plus petite taille. Les exemptions accordées aux négociants en aval dans les déclarations de diligence raisonnable réduiront la complexité, mais ces derniers devront néanmoins traiter et stocker d’importants volumes de données, notamment les numéros de référence et les numéros de vérification .
Que peuvent faire les entreprises pour se préparer à l'EUDR en 2025 ?
Les étapes suivantes décrivent les priorités pratiques pour les entreprises qui se préparent à la prochaine phase de mise en œuvre de l'EUDR :
1. Renforcer les systèmes de diligence raisonnable et la documentation
Développer ou mettre à niveau les outils numériques pour gérer les déclarations de diligence raisonnable (DDS), enregistrer les données de vérification des fournisseurs et s'intégrer au futur système d'information EUDR de l'UE.
2. Établir des protocoles d'engagement des fournisseurs et de partage de données
Collaborer avec les fournisseurs en amont, notamment hors UE, afin de recueillir les informations nécessaires sur l'utilisation des terres, la légalité et la traçabilité. Développer les capacités et la formation à long terme dans les régions d'approvisionnement locales.
3. Planifier la documentation et la préparation à l'audit
Conserver des registres traçables pour démontrer la conformité lors d'éventuels audits ou contrôles d'application de la loi à partir de mi-2026.
4. Surveiller les mises à jour et les modifications réglementaires
Suivre l’évolution de la situation au Parlement européen et au Conseil à mesure que la proposition d’amendement à l’EUDR progresse, afin d’adapter les plans en conséquence.
Le report proposé du règlement EUDR ne signifie pas un abandon de l'agenda de développement durable de l'UE, mais plutôt un réajustement visant à garantir une conformité crédible et applicable. Les grandes entreprises restent soumises à une échéance contraignante en décembre 2025, tandis que les plus petites pourraient bénéficier d'obligations progressives ou simplifiées.
Pour les entreprises, cette période de transition est l'occasion de renforcer leur gouvernance interne, d'améliorer la transparence vis-à-vis de leurs fournisseurs et d'investir dans des systèmes de données capables de gérer le devoir de vigilance à grande échelle. La Commission mettant l'accent sur la préparation numérique et la proportionnalité, une approche proactive sera essentielle. Les entreprises qui se préparent dès maintenant réduiront les perturbations futures et bénéficieront d'un avantage concurrentiel lorsque les contrôles s'intensifieront en 2026.
À propos de l'auteur
Coffee lover and COO of Era of We